Dans la Furieuse, son nouveau texte, Michèle Lesbre égrenne au gré de ses reminescences de voyage et d'enfance; les lectures dont elle garde un souvenir puissant. Pas des romans, plutôt des dérives aventureuses où fleuves et rivières se déploient et l 'embarquent. C'est ce chemin que nous vous invitons à emprunter à ses cotés; Celui d'une littérature dans laquelle elle aime s'abandonner, en compagnie de livres qui la portent et l'accompagnent...Ils vous feront, vous aussi à coup sur chavirer de bonheur!
Exploration des derniers grands espaces américains, ce recueil rempli d'aubes enflammées, de rivières brillantes et de canyons radieux invite à la méditation. Mais la beauté incomparable de l'Ouest sauvage ne peut faire oublier sa fragilité. Dans les pas d'Henry David Thoreau, Abbey dénonce avec passion les coups portés à notre patrimoine naturel au nom du progrès, du profit ou de la sécurité, et se déchaîne contre la cupidité humaine.
Avec En descendant la rivière, nous retrouvons l'Edward Abbey poète et provocateur à son meilleur, au moment où nous avons le plus besoin de lui.
Au milieu des années 1950, Jack Burns reste un solitaire, un homme hors du temps. Il s'obstine à parcourir le Nouveau-Mexique à cheval, vit de petits boulots et dort à la belle étoile. Lorsqu'il apprend que son ami Paul vient d'être incarcéré pour avoir refusé de se soumettre à ses obligations militaires, Jack décide de se faire arrêter. Retrouver Paul en prison et s'évader ensemble, tel est son plan. Mais il est loin d'imaginer que son évasion va déclencher une traque d'une telle ampleur. Car nul ne peut impunément entraver la marche de l'ordre et du progrès.
Seuls sont les indomptés est un chef-d'oeuvre jamais encore traduit d'Edward Abbey, auteur insoumis et emblématique de l'Ouest américain, qui dévoile avec cette échappée sauvage le prix à payer pour la liberté.
Classique de la littérature américaine, ce texte bouleversant raconte l'enfance de Norman Maclean dans les Rocheuses, au sein de paysages magnifiques dont chaque relief transforme en profondeur les êtres qui y vivent. La famille et la nature apparaissent comme des piliers originels de Norman et Paul, le frère adoré, pêcheur hors pair, irrésistible mauvais garçon. Un dialogue silencieux s'instaure avec les rivières et les montagnes, qui apprennent plus que les mots eux-mêmes. Avec un talent et une poésie exceptionnels, Maclean capture la lumière bénie des jours disparus. Adapté au cinéma par Robert Redford (sorti en France en 1993), ce récit iconique a marqué plusieurs générations d'écrivains et de lecteurs dans le monde entier.
On ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve. Eddy le sait. Pourtant il décide, trente ans après une première descente du Mississippi en canoë, de réitérer l'exploit. Mais cette fois ce n'est pas l'exploit qui l'intéresse. Il n'a rien a` se prouver. Il veut juste prendre la mesure du temps écoulé. Eddy a changé, le fleuve a changé, le pays a changé. Quelque chose flotte dans l'air, prémices d'un changement radical. Descendre le cours mythique du Mississippi, c'est traverser les lieux emblématiques d'un passé plus violent que glorieux, et le regarder en face. S'interroger sur les peuples qui vivaient sur ces terres avant l'arrivée des Européens. Évoquer, au gré des rencontres, les actions humaines, bonnes ou mauvaises, sur le milieu naturel. Mais aussi se laisser porter par le hasard, les flots tantôt calmes, tantôt impétueux, et par le fil de pensées vagabondes.
Le Mississippi. Un euve mythique qui descend du lac Itasca dans le Minnesota jusqu'au golfe du Mexique, en passant par Saint-Louis et La Nouvelle-Orléans. Impétueux et dangereux, il charrie des poissons argentés, des branches d'arbres arrachées, des tonnes de boue, mais aussi l'histoire du pays et les rêves d'aventure de ses habitants. À l'âge de trente ans, Eddy décide de répondre à l'appel de l'Old Man River, de suivre en canoë son parcours fascinant pour sonder le coeur de l'Amérique et le sien, tout en prenant la mesure du racisme, lui qui ne s'est jamais vraiment vécu comme Noir. Au passage, il expérimentera la puissance des éléments, la camaraderie des bateliers, l'admiration des curieux ou l'animosité de chasseurs éméchés.
Mais aussi la peur et le bonheur d'être seul. Il en sortira riche d'une force nouvelle et d'un livre fondateur.
À la fin de l'été 1839, Henry David Thoreau et son frère aîné John entreprennent un voyage à bord de l'embarcation qu'ils ont fabriquée de leurs mains. Ils vont suivre le cours de la Concord River, puis de la Merrimack River. Quand John meurt trois ans plus tard, Thoreau décide de lui rendre hommage en retraçant leur voyage, à partir de notes qu'il rassemble dans sa cabane de Walden. Il condense son récit en une semaine symbolique, où chaque journée est associée à un thème : la poésie antique, la sagesse orientale, la culture des Indiens d'Amérique... Au rythme du courant, vif ou lent, les paysages traversés sont décrits avec l'oeil poétique du peintre et la précision du scientifique. Et ce périple, qui fut bien réel, devient un voyage initiatique, une véritable épiphanie, dans l'abandon heureux à la Nature et à l'espace des vastes étendues américaines.
« Au terme de bien des années, je m'étais détachée de la vie que j'avais menée dans la ville, comme nous découpons aux ciseaux une partie de paysage ou d'un portrait de groupe. Navrée du dégât que j'avais ainsi causé à l'image que je laissais derrière moi, et ne sachant trop ce qu'allait devenir le fragment découpé, je m'installai dans le provisoire, en un lieu où je ne connaissais personne dans le voisinage, où les noms de rue, les odeurs, les vues et les visages m'étaient inconnus, dans un appartement sommairement agencé où j'allais poser ma vie pour un temps. »Une femme s'installe en banlieue londonienne près de la rivière Lea, sans trop savoir pourquoi ni pour combien de temps. Elle arpente et explore les franges de la cité tentaculaire, ses marges, les berges des affluents oubliés. Seule, elle observe, se remémore, et, en un dialogue avec le paysage qui l'entoure, décrit ces non-lieux, ces présences, parfois en négatif, de caractères et d'émotions que l'eau traverse. Elle noue parfois des liens avec des personnages singuliers et attachants, évoque son père, un enfant, qui, pas davantage qu'elle, ne seront nommés mais sont tous liés à l'eau vive, à ses enchantements comme à sa mélancolie, à ses secrets comme à sa sauvagerie. Glanant çà et là objets de rebut ou de hasard, attentive aux détails des vies depuis la fenêtre de son appartement ou de celle d'une rame de métro aérien, la narratrice compose en parallèle un univers intime de notations et de symboles. Appareil photo en main, à la première personne, elle entraîne aussi le lecteur au gré des méandres de ses souvenirs, sur les rives des quatre coins du monde. En suivant le cours du Rhin de son enfance, du fleuve Saint-Laurent, du Gange ou d'un ruisseau presque desséché à Tel Aviv, c'est par la finesse d'une langue aussi précise que limpide, ses images poignantes et son regard poétique qu'Esther Kinsky parvient à tisser le fil conducteur de cette envoûtante pérégrination entre rêve et réalité. D'une rare qualité littéraire, ce récit subtil, scandé en brefs chapitres, est pour chacun une invitation au ralentissement et à la contemplation du monde qui nous entoure.
Daily Express, 4 septembre 1945 : « Personne ne sait encore pourquoi Sonia A., une artiste espagnole de vingt-trois ans, a chuté mortellement de 80 pieds sur le pavé de Queensway, Bayswater.
Hier matin, elle a passé un appel téléphonique depuis l'immeuble. Quelques minutes plus tard, elle gisait nue et mourante dans la rue. ».
Quand on a vécu son enfance dans une absolue liberté et que l'entrée dans l'âge adulte ne s'est assortie d'aucun harnais, d'aucune obligation ni désir de servir, de consacrer les bonnes heures du jour au travail, aux soins des enfants ou des animaux, alors la faim de liberté se déplace, elle mute, elle trouve aussitôt d'autres murs à quoi se heurter, d'autres insuffisances : la société, bien sûr, la liberté qu'on n'a pas d'y faire ceci, d'y être cela, mais aussi la limitation du corps et la limitation de l'esprit. Poursuivant un désir à quoi rien ne saurait répondre, Sonia amorce un envol qui n'aura pas de fin.
L'homme qui venait de franchir la frontière, ce 23 juillet 1873, était un homme mort et la police n'en savait rien. Mort aux menaces, aux chantages, aux manigances. Un homme mort qui allait faire l'amour avant huit jours.
En exil en Suisse, Gustave Courbet s'est adonné aux plus grands plaisirs de sa vie : il a peint, il a fait la noce, il s'est baigné dans les rivières et dans les lacs. On s'émerveille de la liberté de ce corps dont le sillage dénoue les ruelles du bourg, de ce gros ventre qui ouvre lentement les eaux, les vallons, les bois.
Quand il peignait, Courbet plongeait son visage dans la nature, les yeux, les lèvres, le nez, les deux mains, au risque de s'égarer, au risque surtout d'être ébloui, soulevé, délivré de lui-même.
De quel secret rayonnent les années à La Tourde- Peilz, sur le bord du Léman, ces quatre années que les spécialistes expédient d'ordinaire en deux phrases sévères : Courbet ne peint plus rien de bon et se tue à force de boire ?
Ce secret, éprouvé au feu de la Commune de Paris, c'est la joie contagieuse de l'homme qui se gouverne lui-même.
Cet ouvrage a reçu un des sept Prix suisses de littérature 2014, le Prix Marcel Aymé 2013, ainsi que le Prix Thyde Monnier de la SGDL 2013.
« Il y aura ce que nous avons été pour les autres, des bribes, des fragments de nous que parfois ils crurent entrevoir.
Il y aura ces rêves de nous qu'ils nourrirent, et nous n'étions jamais les mêmes, nous étions chaque fois ces inconnus magnifiques qu'ils inventaient, ces idées de nous telles des ombres fragiles dans de vieux miroirs oubliés au fond des chambres, et qui ajoutées à nos propres rêves, nos propres et inlassables tentatives de nous-mêmes, composeront durant quelques années encore de la vie sur cette terre cette étrange et brillante, et croirait-on inoubliable mosaïque, où rien ni personne ne permettra de dire vraiment qui nous fûmes. »
Les Petites Terres est un récit d'un seul tenant, tout entier livré à l'évocation d'un amour dont la secrète permanence - au-delà des déchirements, de l'exil et de l'ultime séparation - est la part lumineuse du dernier livre de Michèle Desbordes.
André Breton quelques aspects de l'écrivain Autour des sept collines Un balcon en forêt Un beau ténébreux Carnets du grand chemin Au château d'Argol Les eaux étroites En lisant en écrivant La forme d'une ville Lettrines Lettrines ii Liberté grande La littérature à l'estomac Penthésilée, de kleist, (théâtre) Préférences (critique) La prfsqu'ile Le rivage des Syrtes Le roi pêcheur (théâtre)
Le grand chemin auquel se réfèrent les notes qui forment ce livre est, bien sûr, celui qui traverse et relie les paysages de la terre. Il est aussi, quelquefois, celui du rêve, et souvent celui de la mémoire, la mienne et aussi la mémoire collective, parfois la plus lointaine : l'histoire, et par là il est aussi celui de la lecture et de l'art. La "secondarité" est dans mon caractère ; partagé entre l'anticipation et le souvenir, il me semble ne m'être pratiquement jamais absenté d'un univers à quatre dimensions. J'ai essayé dans ce recueil, à l'inverse de ce que j'avais fait dans Lettrines, de grouper des notes essentiellement disparates par familles, pour communiquer quelque ordre à leur lecture. Si le résultat n'en est pas tout à fait probant, je m'en console, en me persuadant que le tout se reflète un peu dans chacun des fragments qui le composent, et que ces notes ne s'arrangent qu'assez mal de compartiments.
Un petit garçon, primo, vit seul avec son père, ouvrier au chômage.
Pauvreté matérielle et dénuement psychologique marquent ce récit. le père et l'enfant imaginent faire fortune en cultivant des rosiers. on leur coupe l'électricité. ils vont manger dans un bistrot où une femme chante des chansons grivoises. ils volent des cierges dans une église pour s'éclairer. c'est tout et c'est immense. un récit d'une simplicité bouleversante sur les relations père-fils.
«L'âme se manifesta vers minuit. Elle marcha le long du rivage, écarta un buisson et descendit sur la grève. Elle m'y apparut, comme une petite blancheur. Cette blancheur erra un moment, puis s'approcha de l'eau. C'est alors que je perdis la tête. Je détachai la barque du mouillage, et tout doucement à la perche, je la poussai. Elle m'obéit et se mit à glisser sur l'eau noire.»
«Pour y pénétrer, il faut s'acquitter d'une petite somme auprès d'une gardienne qui, ce jour-là, était plongée dans la lecture d'un livre très épais, en format de poche, dont je crus que c'était Guerre et paix avant de constater, avec regret, qu'il s'agissait d'un roman de Joël Dicker. En même temps que nous achetions nos billets, et que Celui-des-ours s'enquérait de la localisation de la tombe de Clément, le chien de Houellebecq, je remarquai un gros rat, quant à lui bien vivant, qui se tenait juste en dessous du guichet, sans se gêner, un peu comme s'il avait été préposé au contrôle des tickets.»Sur les berges de la Seine, les déambulations de l'écrivain prennent des allures de petite odyssée au coeur de friches ou de banlieues bousculées, mais aussi d'une nature sauvage dont jaillit un émerveillement inattendu.
Gaston Bachelard L'Eau et les rêves C'est près de l'eau que j'ai le mieux compris que la rêverie est un univers en émanation, un souffle odorant qui sort des choses par l'intermédiaire d'un rêveur. Si je veux étudier la vie des images de l'eau, il me faut donc rendre leur rôle dominant à la rivière et aux sources de mon pays.
Je suis né dans un pays de ruisseaux et de rivières, dans un coin de Champagne vallonnée, dans le Vallage, ainsi nommé à cause du grand nombre de ses vallons. La plus belle des demeures serait pour moi au creux d'un vallon, au bord d'une eau vive, dans l'ombre courte des saules et des osières.
Gaston Bachelard.
A l'écoute de l'eau et de ses mystères, Gaston Bachelard entraîne son lecteur dans une superbe méditation. Plongée fascinante depuis les surfaces brillantes et claires, où naissent les images fugitives, jusqu'aux profondeurs obscures, où gisent mythes et fantasmes. Le texte d'un philosophe érudit métamorphosé en poète.
Remonter la Marne,"un voyage de retour", comme disent les ethnologues qui après avoir ausculté d'autres sociétés reviennent au pays pour l'explorer. Cette rivière, longue de 520 km, l'auteur l'a remontée à pied, depuis sa confluence avec la Seine jusqu'à sa source sur le plateau de Langres. Mince cordon nerveux situé trop près de la tête, Paris. " C'est là qu'il faut attaquer la maison France avec une chance d'en enfoncer la porte", a écrit Fernand Braudel. Les catastrophes nationales surgissent toujours du côté de ce cours d'eau. C'est une France inconnue et inattendue que l'auteur a découverte. Au gré de ses rencontres, il a été envoûté par la France hors circuit, celle qui ne va jamais à Paris et s'en félicite, la France des "conjurateurs", toutes ces personnes qui, sans être marginales, sont sorties volontairement de la course. Ces personnages résistent, à leur façon, au pessimisme contemporain et conjurent les esprits maléfiques de l'époque : l'esprit de lassitude, la fascination pour la décadence, la tyrannie du consensus.Voyage fragmentaire plutôt qu'inventaire, sorte d'extrait, comme on le dit d'un passage d'un livre ou de morceaux choisis, mais aussi d'un parfum concentré. Livre d'odeurs, de paysages encore intacts, d'églises désertes et de villages "démeublés" mais nullement moribonds. Seule la marche permet un rapport au temps, au silence, et le marcheur reste ouvert à l'aventure d'une auberge improbable, d'un barbecue dominical sur les berges ou d'un héron tout droit sorti d'une fable de La Fontaine. Remonter la Marne, c'est retourner en arrière, un désir d'aller vers l'origine, comme on se remémore son passé.
Quand il arrive à castelnau, un village au fin fond de la dordogne, tout près de lascaux, le narrateur a vingt ans.
C'est son premier poste.
Derrière le rideau gris des pluies de septembre, entre deux dictées, le jeune instituteur s'abandonne aux rêves les plus violents - archaïques, secrets et troubles comme les flots que roule, en contrebas les maisons, la grande beune.
Dans ces contrées où se rejoue encore dans une forme ancienne l'origine du monde, le sexe sépare deux univers. celui des hommes, prédateurs, frustes mais rusés - terriblement.
Et puis celui des femmes, autour de deux figures que l'écrivain campe magistralement.
Hélène, l'aubergiste, mère emblématique, et yvonne, à la beauté royale, qui suscite chez le narrateur une convoitise brûlante et toutes les variations d'un émoi qu'il nous fait partager au rythme de sa phrase : emportée comme un galop de rennes dans une ère révolue, retournée en une scène grotesque où des enfants exhibent l'animal vaincu, mordante ou fuyante comme le loup des peintures rupestres.
Des sources en Forêt-Noire à son delta en mer Noire, Claudio Magris descend le fleuve. En touriste : il visite les paysages et les maisons, s'arrête, à Vienne, devant un simple escalier de bois. En érudit : il découvre les sites majeurs, les rites de la Mitteleuropa ; il croise, semble-t-il, Kafka, Canetti, Lukacs, Joseph Roth..., de passage, eux aussi. En homme : il s'émeut, s'émerveille, s'interroge. Sous la plume d'un grand écrivain, le voyage au gré du fleuve devient aussi une grande fresque des siècles passés.
Sur le champ de bataille de Solferino, le sous-lieutenant Von Trotta sauve la vie de l'empereur d'Autriche. Cet acte lui vaut d'être anobli. Arrachés à leur condition de paysans slovènes, les membres de la famille Von Trotta voient leur destin bouleversé. Sur trois générations, l'auguste faveur se transforme en une malédiction irrémédiable... Un requiem sur la chute de la monarchie austro-hongroise.
Dans une petite ville aux confins de l'empire des tsars, Mendel Singer, un humble maître d'école juif, enseigne les Écritures à de jeunes garçons. Mendel ne supporte plus les tentations d'une société en contradiction avec sa règle de vie et décide alors d'émigrer avec sa famille en Amérique. Mais bien des épreuves attendent le maître d'école ; des épreuves qui vont le hisser à la hauteur tragique d'un Job des Temps modernes. À travers l'histoire emblématique de la famille Singer, Joseph Roth brosse un tableau poétique et lucide des communautés juives d'Europe centrale et orientale à la veille de la Première Guerre mondiale.
Dans le nord-est de la Hongrie, douze ans après la répression de l'insurrection de 1956, une famille multiplie les efforts pour subsister quotidiennement.
Le jeune fils observe et rend compte des réactions de ceux qui l'entourent : sa mère - fille d'un koulak -, son père - fils du seul Juif rescapé du village -, sa grande soeur et son petit frère, sa tante, ses grands-parents et les gens du village. Son récit permet de reconstituer l'histoire de cette famille et, en filigrane, celle de la Hongrie depuis le début du XX e siècle : les traumatismes provoqués par les affrontements de la Grande Guerre, le retour des rescapés du goulag ou les mesures communistes d'expropriation des terres...
Écrit avec une précision ethnographique rare, La Miséricorde des coeurs témoigne d'un long cheminement, d'une lutte incessante pour échapper au destin et devenir libre.
De son arrestation, à Budapest, à la libération du camp, un adolescent a vécu le cauchemar d'un temps arrêté et répétitif, victime tant de l'horreur concentrationnaire que de l'instinct de survie qui lui fi t composer avec l'inacceptable. Parole inaudible avant que ce livre ne la vienne proférer dans toute sa force et ne pose la question de savoir ce qu'il advient, quand l'homme est privé de tout destin, de son humanité.
Imre Kertész ne veut ni témoigner ni penser son expérience mais recréer le monde des camps, au fi l d'une impitoyable reconstitution immédiate dont la fi ction pouvait seule supporter le poids de douleur. Cette oeuvre dont l'élaboration a requis un inimaginable travail de distanciation et de mémoire dérangera tout autant ceux qui refusent encore de voir en face le fonctionnement du totalitarisme que ceux qui entretiennent le mythe d'un univers concentrationnaire manichéen.
C'est pour l'enfant auquel il n'a jamais voulu donner naissance qu'imre kertész prononce ici le kaddish - la prière des morts de la religion juive.
D'une densité et d'une véhémence peu communes, ce monologue intérieur est le récit d'une existence confisquée par le souvenir de la tragédie concentrationnaire. proférée du fond de la plus extrême souffrance, la magnifique oraison funèbre affirme l'impossibilité d'assumer le don de la vie dans un monde définitivement traumatisé par l'holocauste. ce que pleure le narrateur, ce n'est pas seulement " l'enfant qui ne naîtra pas ", : c'est l'humanité toute entière.