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Forêt, forêt de haute futaie, des arbres à abattre : tel est le cri du coeur (et le cri de guerre) que ne peut s'empêcher de pousser le comédien du Burgtheater au cours du dîner artistique donné en son honneur, à l'issue de la première du Canard sauvage, par les époux Auersberger, représentants on ne peut plus typiques de cette société artistique viennoise que l'auteur-narrateur abhorre et avec laquelle il se flatte d'avoir rompu une bonne fois pour toutes quelque trente ans auparavant.Forêt, forêt de haute futaie, des arbres à abattre : parole emblématique opposant à une réalité monstrueusement tangible de l'artifice social le rêve d'un état naturel révolu (et peut-être à réinventer), mais aussi formule magique susceptible de calmer la formidable irritation qui gagne le narrateur au contact renouvelé de cette épouvantable société artistique viennoise qu'il s'était juré de fuir à jamais et à laquelle il est bien forcé de constater qu'il n'a pas cessé d'appartenir.
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«Les peintres n'ont pas peint ce qu'ils auraient dû peindre, mais uniquement ce qu'on leur a commandé, ou bien ce qui leur procurait ou leur rapportait l'argent ou la gloire, a-t-il dit. Les peintres, tous ces maîtres anciens qui, la plupart du temps, me dégoûtent plus que tout et qui m'ont depuis toujours donné le frisson, a-t-il dit, n'ont jamais servi qu'un maître, jamais eux-mêmes et ainsi l'humanité elle-même. Ils ont tout de même toujours peint un monde factice qu'ils tiraient d'eux-mêmes, dont ils espéraient obtenir l'argent et la gloire ; tous ils n'ont peint que dans cette optique, par envie d'argent et par envie de gloire, pas parce qu'ils avaient voulu être peintres mais uniquement parce qu'ils voulaient avoir la gloire ou l'argent ou la gloire en même temps que l'argent.»
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«Trois jeunes pianistes plus que prometteurs - Glenn Gould, le narrateur et son ami Wertheimer - se sont rencontrés autrefois au Mozarteum de Salzbourg pour y suivre un cours donné par Horowitz. Rencontre déterminante au cours de laquelle Glenn Gould fait d'emblée figure de génie triomphant au point de détourner brutalement et définitivement les deux autres de leur carrière de pianiste virtuose.
Mais si le narrateur, après s'être séparé de son Steinway, se mue alors délibérément en un "artiste de la représentation du monde" (Weltanschauungskünstler) tout entier voué à la rédaction toujours recommencée d'un interminable essai sur Glenn Gould, son ami Wertheimer s'engage sur la voie fatale du vaincu, du "sombreur" comme Glenn Gould en personne l'a plaisamment mais fort exactement surnommé aussitôt après avoir fait sa connaissance.
Vingt ans plus tard, au terme d'une longue plongée dans son propre malheur, Wertheimer le sombreur mettra fin au tourment de son existence en se pendant haut et court devant la maison de sa soeur».
Bernard Kreiss.
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« Voici l'un des plus beaux textes de Thomas Bernhard. Il date apparemment de la fin des années soixante-dix, et l'on y retrouve bien sûr les thèmes habituels : l'existence "au degré de difficulté le plus haut" d'un "être de l'esprit" engagé dans une recherche totale et mortelle. Ici, c'est la physiognomonie appliquée à quatre personnages ordinaires rencontrés à la cantine populaire (à ce qu'il y a de plus quotidien donc), dans le disocurs bernhardien en abyme, et en écho aux périodes difficiles dont parlent les romans autobiographiques.
Mais au-delà de la thématique, ce texte est peut-être surtout, lui aussi, une composition grandiose, une magnifique dentelle, une partition magistrale dont les amateurs auront le plus grand plaisir à découvrir une variation supplémentaire. »
Claude Porcell.
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«J'ai écrit ce qu'il y a de plus grand, cela ne fait aucun doute, mais c'est aussi de cette façon que j'ai tétanisé la littérature allemande pour quelques siècles. J'aurai été, mon cher, avait dit Goethe à Riemer, le tétaniseur de la littérature allemande. Ils sont tous tombés dans le piège de mon Faust.» La férocité de Thomas Bernhard fait rage dans les quatre récits rassemblés ici en un volume, selon le souhait de l'auteur. Qu'il s'agisse de Goethe mourant, de la haine de l'Autriche ou la détestation de la famille, l'humour et l'ironie du grand prosateur se révèlent toujours aussi percutants. Mais surtout, ces quatre miniatures contiennent tout l'univers de Bernhard et forment un condensé très maîtrisé des motifs qui traversent toute son oeuvre.
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Né discrètement en hollande où sa mère va cacher un accouchement hors mariage, thomas bernhard est bientôt recueilli par ses grands-parents qui vivent à vienne.
La crise économique des années trente les force à s'établir dans un village aux environs de salzbourg où l'enfant découvre avec ravissement la vie campagnarde.
Le grand-père, vieil anarchiste, doit aller s'installer à traunstein, en bavière. le jeune thomas se familiarise avec le monde de la petite ville, commence à s'émanciper, fait l'école buissonnière et ses premières escapades à vélo. il découvre aussi le national socialisme et la guerre aérienne.
" le monde enchanté de l'enfance " n'est pas celui pourtant du petit thomas.
Persécuté par ses maîtres, souffrant du complexe de l'immigré et du pauvre, il a plusieurs fois la tentation du suicide, tentation qui plus tard hantera aussi l'adolescent et le jeune homme.
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Comme «l'agent immobilier Moritz», nous sommes, dès les premiers mots, «agressés sans ménagement» par un narrateur véhément, qui ne nous lâchera pas avant de nous avoir dit tout ce qu'il a sur le coeur. Dès la première phrase, une interminable tirade hérissée de conjonctions qui se bousculent et d'incidentes emboîtées les unes dans les autres, tout est joué : ou bien nous lâchons prise, ou bien nous reprenons notre élan et nous ne pouvons plus nous arrêter avant la fin. Tout, alors, s'éclaire très vite : nous saurons tout sur Moritz et sa famille, sur les Suisses, nous saurons tout sur le narrateur et nous en saurons encore plus sur notre compte. Car plus il accumule à plaisir les détails sur son mal, plus sa voix furieuse devient universelle.
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Le neveu de Wittgenstein
Thomas Bernhard, Jean-Claude Hemery
- Folio
- Folio
- 3 Janvier 1992
- 9782070384471
Comme celui de Rameau, le neveau de Wittgenstein, que nous présente ici son ami, est un original, pittoresque et pathétique, un vrai personnage de roman. Ce texte, de 1982, n'est pas formellement rattaché aux récits dits «autobiographiques» (de L'origine à Un enfant), mais, sans continuité chronologique, il lui arrive plus d'une fois de narrer et de commenter des événements attestés de la vie de l'auteur, et le «je» fictif qui parle ici ressemble à s'y méprendre à un certain Thomas Bernhard. On ne s'étonnera donc pas que, confronté avec cet étrange ami, «c'est-à-dire avec lui-même», il nous confie, une fois de plus, et toujours mieux, des choses banales et profondes, et drôles à en pleurer, sur la vie, l'art, les prix littéraires, les cafés viennois, la vie à la campagne, la compétition automobile, la maladie et la mort, dans un de ces soliloques hallucinés, répétitifs, impitoyables, dont il a le secret. Pour la première fois, Thomas Bernhard nous parle de l'amitié. Il le fait admirablement et, pour reprendre une de ses expressions, sans le moindre ménagement, et cela fait très mal.
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Sous prétexte de parler de tous les prix littéraires qu'il a reçus, Thomas Bernhard se livre, dans ces textes inédits, à ce qu'il fait le mieux : exercer sa détestation.
Jurés, organisateurs, notables allemands ou autrichiens, personne n'est épargné par l'humour vengeur d'un auteur hypersensible à la médiocrité. Irrésistiblement méchant et drôle, il excelle aussi dans l'art de la miniature. Chaque récit est un joyau, et se lit comme une courte nouvelle. Derrière une apparente désinvolture, Bernhard interroge la nature de l'industrie littéraire et la vanité des distinctions honorifiques.
Tout cela dans un style acéré et ironique à la fois - du grand art. On comprendrait presque pourquoi un certain ministre autrichien, à l'audition d'un de ces discours assassins, s'est retenu de justesse de frapper Bernhard...
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L'Imitateur (choix)/Der Stimmenimitator (Auswahl)
Thomas Bernhard
- Folio
- Folio Bilingue
- 23 Mai 1997
- 9782070401604
Tel un des personnages de cette série de courts récits, Thomas Bernhard voit chaque jour défiler devant lui «le vraisemblable, l'invraisemblable et même l'à peine croyable et l'absolument incroyable». Il ne s'agit pas, on le voit, de démêler la réalité et la fiction, la vérité et le mensonge, qui se trouvent, au contraire, étroitement liés. Chacune de ces histoires, même celles qui font rire, crée un choc, un malaise, une angoisse. Notre petit monde de préjugés et d'idées reçues s'effondre. Thomas Bernhard observe la vie à la loupe, et les curieux animaux, ou monstres, que nous sommes. Chacun de ces textes, concis, précis, invite à réfléchir et à rêver.