L'été 1764, à Livourne, en Italie, un jeune homme de vingt-six ans publie anonymement un court essai traitant de «la cruauté des supplices et de l'irrégularité des procédures criminelles». Le marquis Cesare Beccaria, auteur de l'essai, ne va pas rester longtemps inconnu. Son texte connaît un succès foudroyant et se répand dans toute l'Europe.Beccaria pose les bases de la réflexion pénale moderne. Frère spirituel des Encyclopédistes, il entend fonder «en raison et en humanité» les principes d'une nouvelle justice criminelle. Il développe une pensée originale, qui voit dans la peine une garantie de la loi et non une mise hors la loi. Tenant d'une justice laïcisée, et soucieux de défendre l'utilité sociale, Beccaria dénonce la peine de mort et ses méfaits. Toute peine doit être rapportée à la liberté et non au pouvoir, à l'exigence sociale et non à l'arbitraire du souverain ou du juge.Beccaria, célébré par les Lumières, fut une référence fondamentale de la Révolution, et les principes de sa pensée continuent de nous influencer aujourd'hui.
Les Lumières, selon Kant, c'est le fait pour chacun de se libérer des autorités et des préjugés qui l'empêchent de penser par soi-même. Mais penser par soi-même, cela ne veut pas dire se replier sur soi. C'est au contraire exposer ses idées dans l'espace public pour les partager avec toute l'humanité. Car les Lumières sont un progrès collectif : émancipation de la raison, liberté d'expression, éducation de la jeunesse - autant d'idéaux contenus dans cette devise, que Kant t'adresse : ose savoir !
En 1797, Emmanuel Kant et Benjamin Constant s'affrontent dans une controverse fameuse sur le problème - moral et politique - du droit de mentir. Être véridique est un principe qui doit guider notre conduite. Si Constant reconnaît le bien-fondé d'une telle exigence, il s'oppose à Kant sur son application:selon lui, il ne faut pas en faire une obligation absolue.En donnant à lire une sélection de textes de Kant sur le mensonge et le devoir moral, les objections de Constant dans Des réactions politiques et la réponse de Kant dans D'un prétendu droit de mentir par humanité, cette édition permet d'examiner ce qui a pu être considéré comme la question du siècle:le rapport entre théorie et pratique.En GF PHILO', le texte de l'oeuvre est donné à lire sur la page de droite. En regard, des extraits tirés d'autres oeuvres viennent l'éclairer, le questionner, le prolonger.
Nouvelle traduction
À partir de la formule stoïcienne d'Épictète qui définit la liberté comme sagesse de s'en tenir à ce qui dépend de soi et en continuité avec la distinction de rousseau, entre l'amour de soi, source d'authenticité et d'indépendance, et l'amour-propre, pur reflet de l'opinion des autres, Mme de Staël examine l'effet funeste des passions sur le bonheur : leur pouvoir de destruction de l'autonomie et de l'identité du sujet. Elle analyse les passions positives, mais surtout celles destructrices : l'amour de la gloire, la vanité, le jeu, l'avarice, l'ivresse, la vengeance, l'esprit de parti et l'inconscience face à la menace du malheur.
Les Méditations sur le bonheur (1763), dont le destin éditorial se mêle étroitement à celui des Délits et des peines de Beccaria (1764), inaugurent la carrière littéraire de Verri. Synthèse de sa formation intellectuelle nourrie de la philosophie politique et morale du xviiie siècle européen, de Locke à Helvétius, de Hutcheson à Rousseau, elles sont aussi un vivier d'idées et de thèmes qui vont forger l'identité de l'École de Milan, l'un des grands foyers italiens des Lumières.
Ce petit traité offre une leçon d'humanité mue par un idéal égalitaire. Assignant la quête du bonheur, fondée sur un travail d'analyse de soi et de connaissance des autres, comme objectif de la vie sociale, de la politique et de la législation, l'auteur expose les prémisses de sa pensée réformatrice et progressiste, qui traversa le siècle jusqu'aux lendemains de la Révolution. C'est l'avènement de l'économie politique comme science du bonheur public.
Profondément déçu par la vie, Baruch Spinoza cherche un bonheur qui ne soit pas "vain et futile", mais au contraire qui lui procurerait "une joie continuelle et suprême pour l'éternité". Un vaste programme qui va amener progressivement le jeune homme sur la voie de la philosophie.Cette démarche est le sujet du Traité de la réforme de l'entendement, oeuvre initiatique fondamentale pour aborder la pensée de Spinoza, ici vulgarisée avec talent et humour.
« L'énigme, c'est précisément qu'il semble évident que le monde existe pour nous » : c'est à cette énigme que se confronte Kant dès ses premiers écrits. Tout au long de son oeuvre, le philosophe ne cesse de spécifier le rapport au monde, que ce soit du point de vue de la sensibilité, de la connaissance ou de la morale. Il ouvre ainsi un nouvel horizon pour l'homme, comme « habitant du monde ».
Dans cet ouvrage, Michaël Foessel revisite la « maison Kant » dans ses coins et recoins, et met à l'épreuve la rationalité de l'édifice, dans une confrontation féconde entre Kant, Husserl et Heidegger.
Une lecture forte et vivifiante.
•La culture du doute comme ultime sagesse avec ce voyage en 56 questions philosophiques essentielles •Face à l'intransigeance et au fanatisme, un texte toujours aussi actuel et nécessaire •Une édition de qualité dans une mise en page aérée
Emmanuel Kant est un philosophe allemand du milieu du XVIIIe siècle fondateur du criticisme (philosophie critique tendant à se baser sur les fondements, étendues et limites de notre connaissance). Son ouvrage le plus connu, La critique de la raison pure, explore cette thématique: que puis-je connaître? Que dois-je faire? Que m'est-il permis d'espérer?
Dans cet ouvrage, l'auteur vulgarise les principes fondamentaux de la philosophie kantienne qui selon lui est une philosophie positive, raisonnable dans ce que nous pouvons connaître, altruiste, et faite d'une vision saine de l'homme.
Dans cette fresque, Élisabeth Badinter, observatrice de l'évolution des moeurs et des mentalités, éclaire de façon inédite la société des Lumières, cette « tribu » intellectuelle qui inaugure les Temps modernes, ses grandeurs et ses faiblesses. Les savants et philosophes qui jusque-là constituaient la République des Lettres travaillaient le plus souvent en vase clos. Assujettis aux institutions, ils n'échangeaient qu'entre eux et pour leur seul profit. Avec l'émergence, au milieu du XVIIIe siècle, d'une opinion publique éclairée et de plus en plus puissante, le pouvoir change de camp. On voit naître chez les intellectuels trois « passions » successives qui suscitent rivalités et surenchères au prix d'affrontements parfois terribles.
La première de ces passions est le désir de gloire, et à travers lui l'apparition d'une nouvelle figure incarnée par d'Alembert, codirecteur de l'Encyclopédie avec Diderot : celle du philosophe soucieux de s'imposer comme le meilleur, qui aspire tout à la fois à séduire l'opinion et à s'attirer la reconnaissance de ses pairs. C'est ce même d'Alembert qui introduit une deuxième passion : l'exigence de dignité. Ayant conquis notoriété et autonomie aux yeux de leurs contemporains, les encyclopédistes, conscients du savoir dont ils sont les détenteurs, appellent désormais au respect de leur indépendance et se refusent à toute concession à une autorité extérieure. C'est alors qu'on assiste à la naissance et à l'affirmation de leur troisième grande passion : la volonté de pouvoir, représentée par Voltaire avec un courage qui force l'admiration. Autour de lui se forme un vrai parti politique, le parti des philosophes, qui modèle peu à peu la pensée de la bourgeoisie et prépare l'avènement de la Révolution au nom de la justice, de la liberté et de l'égalité entre les hommes.
Dans cette étude de grande ampleur, Élisabeth Badinter fournit autant de clés pour comprendre et décrypter l'histoire d'un monde intellectuel dont l'influence sur celui d'aujourd'hui est loin d'être dissipée.
«Kant (1724-1804) est un professeur : c'est à travers son enseignement et ses lectures que sa pensée acquiert sa forme propre. Il marque la fin de la métaphysique sous son aspect dogmatique : s'interrogeant sur le pouvoir de connaître, il montre qu'il n'est pas à la mesure de sa prétention à saisir l'inconditionné. Mais il a pris au sérieux l'ambition métaphysique, qu'il attribue à la raison elle-même. L'inconditionné, refusé au savoir, mais manifesté dans l'autonomie de la raison pratique et anticipé dans l'espérance, est le vrai fil conducteur de sa pensée qui le découvre non plus dans l'objet mais dans l'acte, la spontanéité et la liberté.» Alexandre J.-L. Delamarre.
Être « le pays des Lumières » est l'un des grands thèmes nourrissant l'autosatisfaction française. Mais la révérence obligée n'a-t-elle pas édulcoré le message de ces Lumières et gommé la force polémique qui anime leur oeuvre, de Montesquieu à Voltaire, d'Helvétius à Diderot ? Dans ce livre, Bertrand Binoche montre combien ces auteurs aujourd'hui vénérés furent tout sauf consensuels en leur temps - au point de passer pour certains quelque temps en prison. Il éclaire les luttes, souvent violentes, qu'ils ont menées contre ce qu'ils nomment les « préjugés », contre la superstition qui nourrit « l'idolâtrie et le despotisme », contre l'esclavage - et l'on est esclave de ses préjugés comme de ses tyrans.
Les Lumières, « effervescence générale des esprits » disait d'Alembert. « On n'y trouve certes pas une philosophie en bonne et due forme, mais l'infatigable agitation d'intelligences se mouvant en tous sens avec audace et agilité », écrit Binoche. « Qu'est-ce donc que les Lumières ? Une nouvelle appréhension de l'activité philosophique tout entière ordonnée à détruire collectivement le «préjugé» et contrainte de ce fait à s'inventer de nouveaux modes d'existence. Il y en eut beaucoup. C'est pourquoi l'on dit les Lumières. Et ce pluriel est une merveille.
" l'homme ne peut devenir homme que par l'éducation.
Il n'est que ce que l'éducation fait de lui. il faut bien remarquer que l'homme n'est éduqué que par des hommes et par des hommes qui ont également été éduqués. [. ] ordinairement, les parents élèvent leurs enfants seulement en vue de les adapter au monde actuel, si corrompu soit-il. ils devraient bien plutôt leur donner une éducation meilleure, afin qu'un meilleur état pût en sortir dans l'avenir. toutefois deux obstacles se présentent ici : 1) ordinairement les parents ne se soucient que d'une chose : que leurs enfants réussissent bien dans le monde, et 2) les princes ne considèrent leurs sujets que comme des instruments pour leurs desseins.
[. ] mais de qui faut-il attendre un meilleur état du monde ? est-ce des princes ou des sujets ? " (e. kant, réflexions sur l'éducation, p. 98-99).
Thomas de Quincey - pour marquer la prépondérance de Kant dans la philosophie occidentale - osait affirmer que si un lecteur prétendait être indifférent à sa philosophie, il faudrait supposer qu'il soit «parfaitement inintellectuel» ou, encore, « feindre, par politesse, de supposer le contraire».
Avec ce tome III s'achève, dans la Pléiade, la publication des oeuvres du philosophe. Le lecteur, saisissant - ne serait-ce qu'intuitivement - les modifications apportées aux structures de la pensée par la construction de Kant, pourra ainsi avoir un libre et facile accès à l'-uvre d'un des philosophes qu'on ne peut «éviter». On sait trop que c'est à Kant d'abord qu'Heidegger dut s'affronter.
L'éditeur a voulu restituer les oe uvres dans la simplicité de leur évolution chronologique. Si on peut penser que ce dernier volume n'apporte plus de découvertes majeures (il ne faudrait néanmoins pas oublier de quel poids la Métaphysique des moeurs pèse sur nos sociétés et ne pas nier que nous relevons encore du fantasme d'un Projet de paix perpétuelle), on pourra cependant mesurer de quel incessant travail de reprise et d'affinement la pensée de Kant est capable. Ferdinand Alquié - le maître d'oeuvre de cette publication - déclarait qu'«une édition de Kant n'est pas une thèse sur Kant». C'est donc à un humble travail de balisage que se sont attachés ses divers collaborateurs pour guider l'homme curieux - donc susceptible de philosopher - dans cette oeuvre gigantesque qui, incontestablement et peut-être à notre insu -, nous a tous «fondés».
Ce volume contient : Les écrits de 1792-1793 : La religion dans les limites de la simple raison - Lettres à Fichte (1792-1793) - Sur le lieu commun : Il se peut que ce soit juste en théorie mais, en pratique, cela ne vaut point. Des réflexions sur la fin de toutes choses à l'examen d'un prétendu droit de mentir par humanité : La fin de toutes choses - Projet de paix perpétuelle - À propos de l'ouvrage de Sömmering sur l'organe de l'âme - Sur un ton supérieur nouvellement pris en philosophie - Annonce de la prochaine conclusion d'un traité de paix perpétuelle en philosophie - Sur un prétendu droit de mentir par humanité. La métaphysique des moeurs et le conflit des facultés : Métaphysique des moeurs - Lettres à Tieftrunk - Le conflit des facultés. Anthropologie et pédagogie : Anthropologie du point de vue pragmatique - Propos de pédagogie. oeuvres inachevées : Déclaration à l'égard de la doctrine de la science de Fichte - Sur la question mise au concours par l'Académie royale des Sciences pour l'année 1791 : Quels sont les progrès réels de la métaphysique en Allemagne depuis le temps de Leibniz et de Wolff?.
Trad. de l'allemand par Ferdinand Alquié, Alexandre J.-L. Delamarre, Victor Delbos, Jean Ferrari, Luc Ferry, François de Gandt, Pierre Jalabert, Jean-René Ladmiral, Marc de Launay, Bernard Lortholary, François Marty, Joëlle et Olivier Masson, Alexis Philonenko, Alain Renaut, Jacques Rivelaygue, Jean-Marie Vaysse, Heinz Wismann et Sylvain Zac. Édition publiée sous la direction de Ferdinand Alquié avec la collaboration de Claude Berry, Luc Ferry, Pierre Jalabert, François Marty, Joëlle et Olivier Masson, Alexis Philonenko, Alain Renaut, Jacques Rivelaygue et Heinz Wismann.
Qu'en est-il, aujourd'hui, de l'héritage de Jean-Jacques Rousseau? Que pourrait-on en retenir au regard de ce qui nous préoccupe essentiellement? De quels concepts le Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes, Du Contrat social et Les Confessions, notamment, nous permettent-ils encore de profiter?
Pour Paul Audi, le Rousseau qui nous concerne le plus directement pourrait se résumer au legs de ces trois notions clés : liberté, égalité, singularité. C'est surtout le nouage de ces notions ou, plus exactement, la trame des fils présents sous ses noms dans la plupart de ses textes, qui assure à la pensée de Rousseau sa plus vive actualité.
Cet ouvrage complète et, sur certains aspects, approfondit l'essai que Paul Audi a publié en 2008, sous le titre Rousseau : une philosophie de l'âme. Ce qu'il analyse surtout ici, c'est l'articulation rousseauiste de l'éthique et de la politique, donc ses conceptions du bien et du juste, mais aussi bien de l'être-soi et de l'être-ensemble, dont il montre qu'elles éclairent, après coup, plusieurs aspects de notre modernité.
Nier l'existence d'un droit de résistance, n'était-ce pas aussi pour Kant une façon de défendre l'État issu de la Révolution française ? Tel est le point de départ choisi par D. Losurdo pour procéder à une relecture de l'ensemble de la pensée politique kantienne : face à toutes les « incohérences » que celle-ci semble comporter, face à tant de « duplicités », mi-calculées, mi-imposées par le contexte allemand et européen de l'époque, peut-on encore s'en tenir à l'image traditionnelle d'un homme exclusivement préoccupé de rigueur morale et de défense de l'ordre établi ? Le lien entre persécution et art d'écrire que laisse deviner le texte kantien ne suggère-t-il pas, au contraire, une tout autre figure, plus dramatique et moins rassurante ? Celle d'un philosophe contraint de se livrer à un exercice permanent d'autocensure et de dissimulation pour échapper à la vigilance des autorités prussiennes ? Et celle d'une théorie politique dont l'ambiguïté ne fait que réfléchir ce qui, dans les conditions de l'Allemagne contre-révolutionnaire, constitue le prix à payer pour tout intellectuel progressiste désireux de jouir d'une relative liberté d'expression : la laborieuse recherche d'un compromis avec le pouvoir en place.
Kant ne cessa de porter un intérêt profond aux sciences de la nature, depuis ses Premiers articles sur la physique de la terre et du ciel (1754-1764), donnés ici en annexe, jusqu'aux présents Principes métaphysiques de la science de la nature (1786) et au-delà. Au coeur de cet ouvrage se trouve alors la question de la matière, point d'articulation entre la physique et la métaphysique, et plus précisément les principes métaphysiques qui interviennent dans la détermination du concept de matière, tel qu'il est posé au fondement des sciences de la nature, à savoir comme « matière mobile ». Ainsi le projet de construire le concept même de matière - au travers des quatre chapitres que sont la phoronomie, la dynamique, la mécanique et la phénoménologie - présente-t-il le premier échantillon de la métaphysique kantienne de la nature.
La philosophie est une connaissance rationnelle hautement technique, mais elle concerne ce qui nécessairement intéresse tout le monde. Elle consiste dans l'articulation systématique de trois questions : « Que puis-je savoir? », « Que dois-je faire? », « Que m'est-il permis d'espérer? ». Toutes questions que récapitule cette dernière : « Qu'est-ce que l'homme? ».
On rappelle quelle fut la vie de Kant, dont il est devenu d'usage de croire qu'il n'en eut pas. On explicite les grands moments de la philosophie critique, qui se comprend comme l'interrogation rigoureuse d'une liberté finie. On présente les oeuvres qui firent de Kant un auteur cardinal : depuis leur parution, il est impossible de faire sans elles.
Philosopher après Kant, c'est philosopher avec lui, fût-ce pour philosopher autrement que lui.
« Spinoza veut un salut total ; il veut le bonheur, la li- berté, la paix, l'éternité atteints en ce monde, et dès ce monde.
En ce sens, qu'est-ce que l'Éthique ? L'Éthique, c'est l'énoncé de l'ensemble des conditions a priori, si je peux dire, nécessaires pour que ce bonheur, ce salut de l'homme, puisse être réalisé dans le monde mathéma- tique, scientifique que Spinoza croit être le vrai monde.
Car Spinoza est d'abord convaincu que les idées reli- gieuses ne sont que des erreurs, et que la vérité est ma- thématique. Il est convaincu que la nature dans laquelle nous vivons est une nature mathématisée. Et c'est pour- quoi toutes les notions qu'il met en jeu sont en grande partie des notions polémiques, des notions critiques, qui débarrassent l'idée de Dieu et l'idée de l'homme de toutes les illusions qui y sont jointes. » Ferdinand Alquié.
Leurs vies sont si inséparables qu'ils ont écrit leurs oeuvres en écho les uns aux autres : entre Spinoza, Jellesz et Meyer, l'amitié est aussi forte, l'intimité aussi grande qu'entre Montaigne et La Boétie. Meyer a donné à Spinoza l'essentiel de sa physique ; Jellesz l'a introduit à une spiritualité faite de dialogues. À la mort de leur ami, ils publient un témoignage d'amitié jeté à la face de la mort et l'un des textes fondateurs du spinozisme. Ce texte sobre et pudique est la première apparition publique de l'homme. Le livre est complété de l'index des «Opera posthuma» de Spinoza dont ils furent les éditeurs.
On voudrait nous faire croire que les Lumières ont été totalement lumineuses. Mais la Révolution française a débouché sur la Terreur, avant d'accoucher de l'Empire. Est-ce un accident ? Il n'en est rien. Il y a dans la Révolution française une double contradiction. Alors qu'elle se veut antireligieuse, elle donne naissance avec Robespierre au culte de l'Être Suprême. Alors qu'elle se veut morale, elle fait le lit du libertinage poussé au paroxysme par Sade. Il y a une raison à cela. La Révolution française a voulu être révolutionnaire. Elle a cru qu'elle pouvait l'être. Mais elle a été dévorée inconsciemment par l'Ancien Régime dont elle ne s'est jamais vraiment débarrassée. Cette ombre a pesé sur elle. Elle pèse encore sur nous.